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SMF : du quadrille au pas de deux pour les présidents

Mar 9, 2025

La Société météorologique de France (SMF) est officiellement fondée par la circulaire du 17 août 1852.

Un règlement administratif complexe prévoit une élection du président chaque année, sans possibilité pour le sortant de se représenter avant au moins 2 ans. Autant dire que les présidents de la SMF ont été nombreux, certains très célèbres comme Gustave Eiffel ou Henri Becquerel, d’autres moins. Seule caractéristique commune : ils étaient tous des passionnés de météorologie.

Dès l’annonce de sa création, des adhésions payantes sont immédiatement enregistrées tant cette nouvelle science au carrefour de nombreuses disciplines comme la médecine, l’agriculture, la géographie, la physique du globe, la géologie,... suscite d’attente.

Le géologue Charles Sainte-Claire Deville (1818-1876) nous restitue la description précise du règlement administratif dans l’annuaire de la météorologie de 1853, qui devient le principal outil de communication de la SMF. Ce règlement, fort complexe, perdurera jusqu’en 1878, année où la SMF est reconnue d’utilité publique. Ce changement de statut permet d’alléger le règlement. Le président continue à être élu tous les ans mais il est choisi parmi les 2 vice-présidents, eux aussi élus chaque année. Ce processus de nomination perdure jusqu’en 1925 et n’a été interrompu que lors des guerres de 1870 et 1914-1918.

La première élection a lieu le 28 décembre 1852. 153 adhérents peuvent voter directement ou par correspondance. Exceptionnellement cette première année, tous les membres résidant à Paris peuvent candidater au poste de président. Le géologue Auguste Bravais (1811-1863), professeur de physique à Polytechnique, est élu. Trois membres de l’Institut sont élus vice-présidents : le géographe Antoine d’Abbadie (1810-1897), l’agronome Adrien de Gasparin (1783-1862), le professeur de physique César-Mansuète Despretz (1791-1863). L’ingénieur hydrographe Pierre Daussy (1792-1860) complète le quatuor. Charles Sainte-Claire Deville est élu secrétaire. L’ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, Eugène Belgrand (1810-1878), nommé directeur du Service des eaux de Paris en 1854, prend en charge la responsabilité de la gestion des archives et la création de la bibliothèque.

Le nom d’Auguste Bravais nous est presque inconnu, malgré ses travaux sur les structures cristallines avec la mise en évidence de 14 réseaux, dits réseaux de Bravais. Plus récemment, le fait qu’il ait, en 1848, démontré des possibles remontées de la terre par rapport à la mer en observant les rivages des côtes du Svalbard, ont remis ce scientifique en lumière. Outre sa participation à l’expédition internationale et pluridisciplinaire de 1838 sur La Recherche où il se noua d’amitié avec le botaniste et météorologue Charles Martins (1806-1889), il conviendrait aussi de mentionner son hivernage de huit mois avec trois autres scientifiques suédois et norvégiens à Bossekop en Norvège, avec à la clé un mémoire sur les aurores boréales, qui intègre les 11 volumes de la collection « Voyages de la Commission scientifique du Nord en Scandinavie, en Laponie, au Spitzberg et aux Feröe, pendant les années 1838, 1839 et 1840, sur la corvette La Recherche ». 

Une expédition qui fait date puisqu’il s‘agit d’un des tout premiers exemples de coopération pluridisciplinaire internationale. On doit aussi à Auguste Bravais, la deuxième expédition scientifique au Mont Blanc, 57 ans après Horace-Bénédict de Saussure (1740-1799). Il y installa une station météo ! Enfin, il était passionné par l’observation des nuages et développa une instrumentation spécifique pour mieux les observer. La collection instrumentale de Météo-France comporte 2 théodolites dits de Bravais, développés sur la base de ses recommandations. Pour découvrir le parcours extraordinaire d’un homme qui, malgré sa discrétion, était un infatigable travailleur, déterminé et passionné par tout ce qui touchait à ce que nous qualifions aujourd’hui de sciences de l’environnement, il faut lire l’éloge qu’en fit Elie de Beaumont (1798-1874) le 8 février 1864, à l’Académie des sciences.